Face à un modèle social sous tension, la CPME remet au goût du jour une piste fiscale qui divise mais intrigue : la TVA sociale. L’idée ? Soulager les charges sur le travail en les déportant partiellement sur la consommation.
Une réforme fiscale qui revient par la petite porte
C’est une vieille idée qui resurgit dans un contexte où le financement du modèle social français devient un casse-tête national. Le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), Amir Reza-Tofighi, a relancé le débat autour d’un dispositif souvent évoqué mais rarement appliqué en profondeur : la TVA sociale.
Le principe ? Transférer une partie des cotisations sociales vers la taxe sur la consommation, avec un double objectif : redonner de l’air aux entreprises et réduire la pression fiscale sur les salaires. Un projet ambitieux, qui ne va pas sans poser de sérieuses questions.
Doper l’emploi sans alourdir la fiche de paie
À première vue, le raisonnement se tient. En augmentant la TVA – aujourd’hui fixée à 20 % – il serait possible de réduire les cotisations patronales et salariales, et donc, théoriquement, d’encourager les entreprises à recruter davantage et à mieux rémunérer.
Mais pour Amir Reza-Tofighi, pas question de se contenter d’un coup de tournevis fiscal. Une vraie réforme supposerait une hausse significative de la TVA, qui irait bien au-delà des quelques décimales traditionnellement discutées. Cela nécessiterait, selon lui, un véritable pacte social entre tous les acteurs – des salariés aux retraités, en passant par les jeunes actifs.
Le poids silencieux du vieillissement
La proposition s’appuie aussi sur une dynamique démographique préoccupante : la population vieillit, et la natalité s’effrite. Ce déséquilibre, observé partout en Europe, rend le financement des retraites et de la protection sociale de plus en plus dépendant d’un nombre réduit de cotisants.
Dans ce contexte, réduire le coût du travail grâce à une hausse de TVA pourrait permettre aux entreprises de rester compétitives, tout en continuant à embaucher. Mais l’enjeu dépasse les frontières : les entreprises étrangères installées en France seraient également concernées, posant la question de l’équité fiscale à l’échelle internationale.
Une taxe qui frappe fort… les plus fragiles
C’est le talon d’Achille du dispositif. La TVA, impôt indirect par excellence, frappe tout le monde… mais pas de manière égale. Les ménages modestes, qui consacrent une part importante de leur budget à la consommation, en pâtiraient davantage. C’est ce caractère régressif qui fait tiquer économistes et associations.
Pour compenser cette injustice, plusieurs pistes sont sur la table : maintien de taux réduits sur les produits essentiels, aides ciblées pour les foyers les plus vulnérables, ou encore crédit d’impôt pour lisser les effets de seuil. Des mécanismes déjà testés ailleurs en Europe, avec des résultats en demi-teinte.
Vers un nouveau pacte social ?
Au fond, ce que soulève la CPME dépasse la technique fiscale. Derrière cette proposition se dessine une volonté de refonder les bases du contrat social, en ajustant les contributions de chacun au regard des évolutions économiques et démographiques. L’idée : financer plus justement la solidarité nationale, sans sacrifier la compétitivité ni aggraver la précarité.
Reste à savoir si le pays est prêt pour une telle transformation. Car toucher à la TVA, en France, c’est toujours jouer avec une grenade dégoupillée.